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WhiskyMag.fr : 7 vœux très spiritueux pour la nouvelle année
7 vœux très spiritueux pour la nouvelle année
Publié le 2 janvier 2020
Et si je commençais par vous souhaiter une bonne année à toutes ? Allez, comme ça ce sera fait et je ramerai pour trouver une chute plus originale. Tous mes vœux les plus sincères pour 2020, et si vous lisez mes âneries spiritueuses, occasionnellement ou régulièrement, vous méritez ce baume. Cœurs avec le clavier <3 <3 <3 Et pendant que vous dressiez la liste de vos bonnes résolutions, celle-là mêmes que vous enterrerez dès le 15 de ce mois, je vous détaille celle de mes vœux susmentionnés.
1 De l’armagnac et du calvados
En 2020, donnons une chance à deux spiritueux qui, dans mon monde idéal, se partageraient le record des ventes : l’armagnac et le calvados, eaux-de-vie de vin et de cidre dont les appellations dissimulent des trésors, des stocks indécemment âgés, des gnôles fines et précieuses qui ne demandent à subvertir les amateurs se laissant plus volontiers guider par la curiosité que par l’étiquette sur la bouteille. Et pour des sommes ridicules si l’on considère la qualité du liquide. Deux spiritueux où l’on sent encore la patte humaine et la matière première, la pomme, la vigne, deux gnôles produites à petite échelle, qui ne feront pas 3 fois le tour du globe avant d’arriver dans vos verres. Faites-vous plaisir cette année, choisissez une bouteille de chaque.
2 Plus de plaisir, moins de dégustations millimétrées
En 2020, si on lâchait un peu plus souvent nos carnets et nos verres de compète ? Si on arrêtait de chercher le congénère manquant en faisant le signe de croix pendant des plombes, la copita à l’aplomb des narines ? A quoi bon gratter des centaines de notes de dégustation si elles n’évoquent que des quilles ? Si pas une ne nous renvoie illico à cette soirée merveilleuse où, jusqu’aux premières lueurs du jour, on a refait le monde entre potes autour d’un whisky honnête, un rhum de belle facture ou un cognac brut de velours, oh rien d’impressionnant à poster sur FB, juste un moment de plaisir et de partage.
3 En attendant le retour du pastis
En 2020, j’avoue un truc honteux : je rêve d’un retour en force du pastis et des anisés, mon coupable plaisir estival (pire sur l’échelle Shame-Honte Eternelle : je ne résiste jamais à une mauresque dès que le mercure frétille au-dessus de 28° C – un trait de sirop d’orgeat, 2 mesures de pastaga, 3 gouttes d’eau pas plus, glace). Qui signe avec moi la pétition pour le classement du petit jaune au Patrimoine Culturel mondial de l’Unesco ?
4 De la transparence, pas de la pureté
En 2020, puisse la question de la transparence et de la traçabilité dans les spiritueux devenir centrale. Le débat sourd depuis quelque temps, et il est plus que légitime : indispensable. En revanche, la dérive dudit débat vers la nécessité de protéger et garantir la « pureté » des spiritueux – en premier lieu le rhum – me dresse les couettes à l’horizontale. De quelle pureté parle-t-on ? Le mot revient bien souvent dans les concours de vertu et les pelletages de chignon sur les réseaux sociaux. Et le concept ne laisse jamais de bons souvenirs quand ses doctrinaires l’enfoncent au marteau : pureté esthétique, morale, raciale, pureté biologique, philosophique, linguistique, pureté des femmes (je vous laisse compléter la liste longue comme un Dry January)… On peut militer pour ou contre l’édulcoration, les finishes, l’exode de la maturation, tel type de distillation, pour ou contre la transparence, la régulation, la protection… Mais la pureté n’a rien à faire dans la tambouille.
5 Moins de bois
En 2020, le premier qui me parle de triple cask, je lui fais boire la sciure, et je le dis le plus gentiment du monde. On en a parlé à moult reprises (ici notamment), Serge Valentin l’a parfaitement résumé dans l’interview qu’il a accordée à Whisky Magazine (à lire ici) : ras le bol des gnôles de charpentiers, du discours (et des pratiques) monomaniaque sur les fûts de vieillissement, haro sur les rhums et whiskies Dorito qui se déclinent dans tous les parfums, toutes les saveurs, avec un code couleur par packaging : finish sherry oak, porto, STR, cognac, vin rouge, vin blanc, madère… Sans compter les cumulards de l’affinage dont les gnôles gloubiboulga se ressemblent toutes. Envoyez STOP au Père Noël, qui centralisera.
6 Davantage d’eaux-de-vie de fruits
En 2020, si je devais formuler un vœux pieu… Chiche que les eaux-de-vie de fruits françaises reviennent bientôt à la mode ? Ancrées dans l’histoire régionale, elles cochent toutes les cases aujourd’hui exigées par les consommateurs : petits producteurs, cultures locales pour beaucoup, fabrication artisanale, distillation discontinue, promesse « au plus près de la nature », de l’humain derrière l’alambic… Et on y déniche des merveilles, finement distillées, patiemment mûries sous verre. Allez, cette année on cueille les fruits à la sortie d’alambic.
7 On file les clés de l’asile aux dingues
En 2020, qu’on laisse les dingues, les fêlés de la calebasse, les fous furieux de l’imaginaire, les empêcheurs de distiller en rond repousser les limites en bouteille. Quand John Glaser se mélange les douelles ou mixe calva et whisky, quand Guillaume Ferroni ressuscite l’eau de pucelle et autres gnôles disparues (à lire ici), quand Alexandre Gabriel décide de faire du gin à Cognac vingt ans avant tout le monde, quand Nicolas Julhès crée une écriture spiritueuse sans oublier une seule matière première, quand Fred Revol remet du terroir dans le whisky à une époque où le mot n’était pas à la mode (terroir, pas whisky), quand Guilhem Grosperrin élève ses gnôles à la cloche tibétaine (si, si), et toute une poignée d’azimutés de l’alambic ou du tonneau avec eux, avouez qu’on s’ennuie un tout petit peu moins dans la vie. Parce que, à une époque où l’on veut tout mettre au carré en coupe réglée, leurs échappées font du bien.