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Terres de Cognac – Mars Avril 2010

Dans la région : une situation singulière

Autant le millésime est monnaie courante en Armagnac, autant dans nos terres de Cognac, il fait figure d’exception.

Les millésimes ont une double singularité: un âge certifié (ou plutôt une date de naissance certifiée, on verra que la nuance est d’importance) et le fait d’être souvent des eaux de vies non assemblées. Le principe même de millésime est donc en totale contradiction avec la philosophie qui prévaut dans notre région: des assemblages savants, qui reproduisent systématiquement un produit aux caractéristiques précises, en mêlant des eaux de vie de provenances et âges différents. Un XO peut être composé de dizaines, parfois de centaines d’eaux-de-vie qui ont toutes été élevées plus de 6 ans en fût de chêne. Ce qui signifie que certaines ont peut être 15 ans de vieillissement et d’autres 30. Comme le dit M, Touteau, maitre de chai de Delamain, en une image très explicite : «Quelle que soit sa qualité et sa catégorie d’âge, faire un cognac d’assemblage, c’est aller toute le temps à Rome par des chemins différents. Alors qu’élaborer un millésime, c’est créer un voyage unique ».

« De tous temps il y a eu des millésimes » fait remarquer Eric Forget, maître de chai de Hine. Stéphane Bumnez, propriétaire de la Maison Prunier renchérit « Les cognacs avec une véritable traçabilité d’âge commencent vers |880.Presque toutes les maisons en faisaient avant la mise en place de l’AOC cognac », et de citer, les yeux rêveurs, des millésimes d’anthologie comme 1893 ou 1914.« {! y avait encore beaucoup de cognacs millésimes dans les années 50 »

Alors qu’est-ce qui explique cette rareté des millésimes dans l’univers cognac? Une des raisons est que dans les années 60, l’interprofession avait interdit la commercialisation de millésimes. Pourquoi? Deux explications sont avancées:

  • La première est la crainte des fraudes. Faute de pouvoir contrôler l’âge des millésimes, l’interprofession préférait les interdire purement et simplement.
  • La seconde se proclame moins haut Elle est liée à la structure économique et commerciale de notre région. C’est tout simplement que les grandes maisons, qui battent le rythme qui lequel danse toute l’appellation, n’ont jamais fait des millésimes leur fer de lance. Parmi les super-grands, seul Remy Martin a lancé dans les dernières années un 1989 millésimé, et uniquement sur les marchés étrangers. « Mettre en avant des gammes de type VS, VSOP, XO permet de mettre sur le marché d’immenses quantités de produits. Ce qui n ’est pas compatible avec la commercialisation de millésimes » explique un négociant.
Le cas particulier des “Early Landed”

Hine est célèbre pour ses cognacs « Early landed ». Le système est très particulier: il remonte au XIXe, à l’époque où les cognacs étaient expédiés en barrique vers les îles britanniques Les eaux de vie étaient alors stockées dans des chais en bordure de la Tamise, à Bristol dans une atmosphère bien plus fraîche et humide que celle de nos chais charentais. La tradition, paraît-il, pour les familles nobles anglaises, était d’acheter un fût à la naissance d’un fils, et d’embouteiller le cognac pour son manage. A la dégustation, ces eaux de vie se révélaient fort différentes de leurs sœurs restées sagement en bordure de Charente. Leur séjour anglais les avait amollies, elles étaient moins alcooleuses, plus rondes. « Historiquement, les eaux de vie vieilles en Angleterre étaient embouteillées sur place, c’est ce que l’on appelait les fûts de chênes. Actuellement nos eaux de vie sont élevées pendant un an en fûts neufs à Jarnac sous contrôle du BNIC, puis le tiers de chaque lot est envoyé en Angleterre dans les « bonds », ces chais sous contrôle des douanes anglaises ; pour les étapes de transport non contrôlées par les services officiels, c’est le bureau Ventas qui est garant de la traçabilité À la fin de la période de vieillissement anglaise (minimum 20 ans), les eaux de ne reviennent, toujours sous contrôle, afin d’être embouteillées à Jarnac. » .Hine n’était pas la seule maison à pratiquer ce vieillissement « au goût anglais ». « Il y avait des chars dédiés aux Early Landed à Londres, dans le quartier de London Bridge, mais surtout à Bristol » précise Steven Spurrier éminent dégustateur londonien

L’interdiction a ainsi duré jusqu’en 1988. En 1989, la mise sur le marché des millésimes a de nouveau été autorisée, mais sous conditions: les cognacs millésimés doivent faire preuve d’une traçabilité sans faille depuis leur distillation jusqu’à leur expédition. Et le principe du contrôle est extrêmement contraignant.

Des flacons de rêve… sous haute surveillance

Pour prétendre a un millésime, une eau-de-vie doit être parfaitement identifiée, isolée, et suivie sans interruption à tous les stades de son élaboration. Par délégation de la DGCCRF ce suivi peut être assuré par le BNIC. « Il n’existe pas à proprement parler une législation sur le contrôle des millésimes » précise Didier Vassor, responsable du BNIC «ils entrent dans le cadre général du contrôle des comptes d’âge des cognacs », (défini par un arrêté du 27 juillet 2003, modifié en 2005 et en 2008) Concrètement, pour être millésimée, une eau-de-vie doit être identifiée et isolée dès sa mise sous bois, avant le 30 avril qui suit la vinification et la distillation. (La législation était encore plus contraignante au départ, car les eaux de vie destinées à être millésimées devaient être mises en barrique en présence d’un opérateur assermenté avant le 1er avril… ce qui laissait peu de marge de manœuvre étant donné que la période de distillation court jusqu’au 31 mars. Elle s’est assouplie par la suite). Le bouilleur de cru ou le négociant qui souhaite produire des millésimes à le choix entre plusieurs solutions: le contrôle par le BNIC, le stockage dans des chais appartenant à l’ORECO le contrôle par huissier ou une tenue impeccable de ses livres de compte qu’il estime suffisante. : Afin d’aider ses ressortissants à assurer la traçabilité des eaux de vie, le BNIC a mis en place dès 1989 un service de suivi des eaux de vie. « Le principe est simple », explique Didier Vassor: « Le technicien du BNIC, Thierry Falcon, se déplace dans les chais, assiste à la mise en barrique des eaux de vie, puis soit les sont scellées avec un cachet du BNIC, soit les chais sont fermés avec une double serrure et un double jeu de dés: l’une est conservée par le propriétaire des eaux de vie, l’autre par Thierry Falcon ». Le représentant du BNIC sera ensuite présent chaque fois qu’une manipulation sera nécessaire: soutirages, réductions, filtrations, passage au froid. Toutes les opérations jusqu’à l’embouteillage final. Actuellement, environ une centaine de producteurs et négociants ont choisi de faire appel aux services de Thierry Falcon. Chez Delamain à Jarnac, on peut voir ce double système dans un chai de la rue Basse: dans un chai premier accessible, des barriques fermées par un sceau rouge, d’autres qui reposent dans un second chai derrière une grille condamnée par le même sceau, On entend souvent dire dans la région que le contrôle par le BNIC est ka seule façon de certifier le millésime d’une eau-de-vie. « Faux, C’est une facilité que nous proposons, une prestation d’ailleurs © payante, mais en aucun cas obligatoire » me précise M.Vassor « C’est un simple service, une garantie vis à vis de la DGCCRF et les sociétés dont nous suivons les millésimes ne peuvent pas le revendiquer comme un avantage sur leurs concurrents »..


Les eaux de vie chez ORECO

Une seconde solution est le stockage des eaux de vie dans des chais sous contrôle d’ORECO (Organisation de Régulation Economique des Cognacs), que beaucoup croient être un organisme d’état « Pas du tout » explique M. Guérin, Responsable administratif et financier d’ORECO, « nous sommes une Société Anonyme, qui a un statut de Magasin général d’Etat accordé par la Préfecture ». La nuance est d’importance, car elle implique qu’ORECO est sous une surveillance aussi pointilleuse de la DGCCRF et du BNIC que n’importe quel opérateur privé. « ORECO, c’est le coffre fort en nature de la région ». Beau coffre fort, mieux que celui de l’Onc’ Picsou.… l’ORECO gère une centaine de chais dans la région d’appellation, qui conservent les milliers d’hectolitres dorés de producteurs et négociants, des plus petits aux plus grands, avec une discrétion désormais bien supérieure à celle des banques suisses. ORECO n’est pas un simple lieu de stockage, depuis sa création en 1932, il sert aussi de caution bancaire aux producteurs et négociants. Quand un opérateur apporte ses eaux de vie à ORECO, elles sont enregistrées, et ORECO émet deux documents: d’une part un récépissé à ordre, qui reprend tous les éléments de la carte d’identité de l’eau de vie -date de dépôt, nom du déposant, cru, compte d’âge (et non année), quantité, et TAV ; d’autre part un warrant, un effet bancaire, que le déposant pourra porter à sa banque afin de bénéficier d’une avance de trésorerie. ORECO n’est pas le Mont de Piété, mais le système complet y ressemble. On comprend donc facilement tout l’intérêt que représente l’ORECO pour les producteurs et négociants. Ainsi, du fait des difficultés économiques après 1973, les stocks d’ORECO avaient explosé.

Les eaux-de-vie peuvent entrer à ORECO à tous comptes d’âge, mais le cas des millésimes est spécial. Pour bénéficier de la certification de millésime, l’eau de vie doit entrer en 00, c’est à dire fraîchement distillée, et avant le 30 avril. Si elle rate le coche, tant pis. « Une eau de vie distillée en 1972 entrée chez ORECO en février 1973 peut revendiquer un millésime 1972; si elle y est entrée en juin 1973, elle pourra revendiquer un âge, mais pas un millésime ».

Toutes les opérations sont contrôlées par ORECO, soit dans des chais appartenant à ORECO, soit dans des chais loués par ORECO, soit dans des chais appartenant aux clients mais contrôlés par ORECO: le client n’en a pas les clés, Les opérations sont menées selon les directives des clients, «ils précisent par cahier des charges s’ils souhaitent un vieillissement en fûts neufs ou fûts roux par exemple » Les eaux-de-vie sont contrôlées par des courtiers assermentés à leur entrée, et régulièrement ensuite, pour les inventaires en particulier. ORECO a un rôle de conseil, et peut interpeller le client sur la nécessité de changement de fût par exemple. Et au final, les sorties des millésimes ORECO se font soit sous contrôle du BNIC, soit sous contrôle d’huissier,

Impossible d’arracher à M. Guerin le secret du volume de millésimes dormant actuellement sous ORECO. « De toutes façons, rien ne dit que les millésimes sortiront en tant que millésimes ». Chez ORECO les eaux de vie millésimées les plus anciennes datent des années 50… Mais il ne faudrait pas croire à des stocks considérables, le volume est parfois d’une seule bonbonne; les plus gros stocks millésimés sous ORECO ont une quinzaine d’années.

Le contrôle par huissier

« C’était la solution traditionnelle des mai- sons qui commercialisaient des millésimes avant les années 60 » dit Stéphane Burnez, qui fait appel à un huissier pour toutes les opérations sur les millésimes de la Maison Prunier. Dans les années 60, le père de Stéphane Burnez avait stocké des eaux-de-vie chez SORDEC, l’ancêtre d’ORECO, puis les avait « oubliées ». En 89, quand IS l’interprofession a ré autorisé les millésimes, la Maison Prunier a pu d’emblée mettre sur le marché des cognacs millésimés de plus de 20 ans d’âge. « Nous étions des précurseurs, notre démarche a éveillé beaucoup de soupçons. D’emblée, nous avons voulu instaurer une traçabilité parfaite.… Mes eaux de vie sont suivies par un huissier à toutes les étapes. J’ajoute même une sécurité supplémentaire par rapport aux eaux-de-vie contrôlées par le BNIC: nos bouteilles millésimées sont non seulement numérotées, mais aussi scellées en présence d’huissier; si les bouteilles ne sont pas scellées, tout le reste peut ne servir à rien. » Chez Frapin, qui vient de mettre sur le marché sa deuxième série de Multimillésimes, Olivier Paultes explique: « En 1979, mon prédécesseur a décidé de faire appel à un huissier pour sceller des fûts, dans l’espoir qu’il serait un jour possible de millésimer de nouveau »

Des suivis personnalisés

Mêmes précautions chez Jean et Guilhem Grosperrin, où à côté des cuves et dames- jeannes, on peut voir des cuves en inox (moins photogéniques, mais tout aussi indispensables dans le process), revêtues du sceau écarlate de l’huissier. Les millésimes, ici aussi, sont une histoire de passion. « Nous avons la plus vaste gamme de millésimes, dont certains sont très anciens. Nous proposons une eau-de-vie de 1944 » explique Guilhem Grosperrin. Courtier de campagne depuis 1991, Jean Grosperrin a créé La Gabare en 1992; il a directement stocké ses eaux de vie préférées en s’assurant une parfaite traçabilité. Leur commercialisation en tant que millésimes a démarré en 1999. Cette petite maison a elle-aussi voulu s’entourer du maximum de précautions pour pouvoir contrer les soupçons de fraude qui n’ont pas manqué. Partant du principe qu’il vaut mieux s’adresser au Bon Dieu (la DGCCRF) qu’à ses saints (les services du BNIC) «nous nous somme rapprochés directement de la DGCCRE avec qui nous validons systématiquement les moyens de contrôle que nous mettons en application. Pour certaines eaux de vie nous avons doublé la traçabilité papier (cahiers de chai et documents commerciaux) par des datations au carbone 4,» La datation au CI4 toute seule n’est pas suffisante, mais elle apporte une preuve supplémentaire.« En réalité, c’est souvent un tout. Quand on trouve une eau de vie splendide, elle est le plus souvent assortie d’une traçabilité impeccable ». Les plus belles filles se présentent donc avec des papiers en règle.

Le marché des millésimes : beaucoup de bruit pour rien ?

Après l’exposé d’un tel luxe de précautions, on s’attendrait à ce que les millésimes soient systématiquement présentés comme des ovnis, à grand renfort de surenchères marketing, et à ce que leur marché constitue un Eldorado… Que nenni.

Les quantités proposées sont si modestes, le marché si confidentiel, que les millésimes, mêmes onéreux apparaissent plus comme une infime cerise (à l’eau-de-vie) sur le gâteau du cognac qu’une part notable de ce gâteau. Les lots sont minuscules: chez Delamain « il n’y a que 520 l du millésime 1980 » dit Dominique Touteau « et cela représente en tout et pour tout une vingtaine de bouteilles destinées au marché français. « Les millésimes ne représentent que 1 à 2 % de la production de Hine. C’est vraiment un marché particulier; un millésime, c’est compliqué à comprendre » explique Eric Forget. Pour Stéphane Burnez « Les millésimes sont un épiphénomène, mais ils servent d’étendard pour le reste de notre gamme ». « Nous embouteillons parfois seulement 100 l » dit Guilhem Grosperrin. Idem chez AE DOR, connu pour son chai de dames Jeannes vénérables « Nous ne vendons les millésimes qu’au compte-goutte » dit Alain Bouron, responsable commercial « ils sont notre trésor ». Frapin a fait récemment la une des journaux avec ses multi-millésimes: un premier assemblage de millésimes 82-83-85 (médaille d’or de l’international Spirits Challenge), et un assemblage de 79-83- 85, Mais les millésimes ne sont pas toujours mis en avant « Nous ne communiquons pas spécialement sur les millésimes » dit Dominique Touteau, personnification de la discrétion de Delamain.« Les millésimes, c’est un aspect du cognac, un aspect mais ce n’est qu’un aspect » dit Stéphane Burnez. « Nous ne jouons pas sur la rareté » renchérit Guilhem Grosperrin. Bien sûr, les merveilles en question ne sont pas données. Les millésimés sont vendus en moyenne 3 à 5 fois plus chers que des cognacs du même âge non millésimés mais certains prix sont plus modestes : une Petite Champagne La Gabarre 1974 vieillie 34 ans est vendue 118 euros à la Cognathèque, une Grande Champagne 1971, qui affiche 36 ans de vieillissement certifiés est vendue 174 euros.

Des prix élevés quand l’amateur de cognacs scrute le fond de son porte-monnaie, mais qui restent très comparables aux prix de certains cognacs non millésimés de même catégorie d’âge. Le coût de production spécifique est-il vraiment répercuté ? « Par rapport aux eaux de vie restées à Jarnac, le prix des Early landed qui ont fait l’aller retour Jarnac Londres ne reflète absolument pas ce surcoût de transport » confie Eric Forget. Qui achète les millésimes? Surtout les pays étrangers. Il n’y a pas de « pays de millésimes », ils se vendent dans les zones friandes de cognacs d’exception, (Russie, Asie) où ils sont achetés surtout chez les sommeliers et restaurateurs Idem sur le marché français, où les cognacs millésimés sont si rares que l’amateur les trouvera plus facilement proposés dans les restaurants étoilés que chez son caviste favori. Vu côté boutique, « il y a un tout petit marché » dit Stéphane Denis, qui propose une cinquantaine de cognacs millésimés. A la Cognathèque, les acheteurs de millésimes sont surtout intéressés par le fait d’acheter une bouteille avec une date, pour célébrer un événement. C’est le « millésime anniversaire ». Les grands amateurs curieux de découvrir le millésime sont beaucoup plus rares. Les Denis, également bouilleurs de crus en Grande Champagne, ont commencé à isoler des lots millésimés. Point étonnant, vu le parcours de combattant du postulant à la vente de millésimes: l’identification d’un cognac millésimé parmi les autres n’est pas toujours évidente pour l’acheteur distrait. On se rappelle les mésaventures récentes d’un certain Président français offrant un cognac qu’il croyait distiller en 1713 à son homologue polonais. Il suffit de balayer du regard les rayonnages de votre caviste préféré pour constater que des dates peuvent s’afficher en grand sur l’étiquette ou la collerette de certains cognacs issus de maisons fort réputées, sans pour autant se rapporter au millésime: elles commémorent la fondation de la maison, la création de la recette, ou un autre événement marquant de l’histoire de la société

Alors pourquoi se donner tant de mal?

Pour les maisons qui ont fait des millésimes un de leurs point forts, la réponse est simple et unanime: pour la beauté du geste. Pour l’art. Pour le style. Pour Dominique Touteau « les eaux-de- vie sont des êtres vivants. Ce qui est intéressant dans un millésime, c’est sa vie, pas sa date de naissance » « Un millésime, c’est une odeur, une image. Le millésime est une façon de mettre en exergue un cru plus qu’une année » Pratiquement tous les millésimes commercialisés comme tels ont au minimum une vingtaine d’années de fût. Vigneron bourguignon avant de devenir négociant à Cognac, Stéphane Burnez affirme une philosophie, un respect du millésime qui lui vient du monde du vin: « La force du Cognac, ce sont les terroirs. On cherche avant tout le respect du terroir. A travers un millésime, on révèle un terroir et une année. Quand on vient du monde du vin, ce rapport au millésime s’impose, il est naturel, En produisant des cognacs millésimés, j’ai l’impression de rester au plus près de ce qui fait la qualité des cognacs, de faire un lien avec le XIX°, ses deux formes de bouteilles et la beauté de ses eaux-de- vie. Un millésime, au fond, c’est un cognac « de garage » (référence à ces vins de St Emilion et Pomerol, aussi rares que célèbres, dits « de garage » car élaborés dans des chais minuscules-NDLR) « Dès la distillation » dit Eric Forget « on sait si on aura une grande année. Tous les ans nous sélectionnons des lots pour les millésimer éventuellement, mais au final, certains millésimes ne nous plaisent pas. Nous n’avons pas fait de millésime 1980.

Le millésime a un effet marqué, la maturité du raisin se retrouve dans les eaux-de-vie. ».… « Ce qui fait la beauté d’un millésime, c’est sa singularité. Un millésime est constitué d’une à deux eaux-de-vie de la même année au maximum; il aura peut-être moins decomplexité qu’un assemblage, mais certains plus présents » « Le Cognac est avant tout un produit d’assemblage » dit Guilhem Grosperrin. « Le millésime doit rester l’exception. Ce n’est bas parce que l’eau de vie est millésimée qu’elle est automatiquement de grande qualité, Le danger de la mode croissante du millésime, c’est que des opérateurs mettent sur le marché des produits très médiocres comme s’ils étaient magnifiques, pour la seule raison qu’ils sont d’âge certifié. Une eau de vie doit être millésimée uniquement si elle est intéressante par ses particularités. C’est pour cela que nous parlons de cognacs de collection » La dégustation des cognacs Grosperrin révèle en effet de jolies curiosités, comme un Bois Ordinaire 1991 de l’Ile d’Oléron (embouteillage 2010), aux senteurs de mimosa, d’angélique et d’aguilles de pin qui annoncent l’été, une Grande Champagne 1971 (embouteillage 2008) au nez de pâte de fruit, qui hisse en bouche un parfum de cardamome et de verveine. Dans tout cela, les multimillésimes sont une curiosité de plus. Une philosophie hybride entre millésimés et cognacs d’assemblage. « On a voulu marier le rancio du 82, le fruité du 83 et l’élégance du 85 » dit Olivier Paultes. La dégustation le confirme. Chez Frapin, le fait de travailler des eaux-de-vie issues de la propriété fait que la notion de millésime est particulièrement forte; mais la conservation des eaux de vie n’est pas systématique « On recherche toujours la spécificité. Nous avons des 79 millésimées, de très belles 82, des 83 très fruitées, en revanche nous n’avons pas été intéressés par l’évolution des 84, elles n’avaient rien de spécifique, donc nous ne les avons pas conservées en tant que millésimes » Impossible en tout cas de trouver sur le marché le multimillésime N° |, qui s’est arraché à travers le monde. Frapin n’est pas seul à commercialiser des multimillésimes, on trouve aussi des multimillésimes de cognacs de plus de 40 ans: Camus a édité ainsi le 3 128 (assemblage de 3 eaux de vie de 41,43 et 44 ans — somme 128 ans;2300 euros à la Cognathèque) et une Grande Champagne La Gabarre, embouteillée en 1988, fruit de l’assemblage de millésimes 1931, 1932, 1933, aux senteurs de cuir et de vieux papier et au goût légèrement salé (environ 400 euros).

Comment ne pas évoquer enfin les trésors inaccessibles de chez AE DOR, collectés par Amédée Edouard au XIX° s. Les « rarissimes », dont le plus jeune date de 1893, et le plus ancien, le soleil d’Austerlitz, de 1805. Cognacs que le palais des simples mortels ne goûteront jamais, mais rien n’empêche de les admirer. Ils nous rappellent au final, ce que sont les millésimes dans le marché des cognacs: un instant d’éternité. De quoi être rare et cher en effet.

Les maisons connues pour leur millésimes :

Hine; Prunier; La Gabarre- Cognacs Grosperrin; Jean Filioux-La Pouyade; Château de Beaulon; Frapin; Camus; Delamain; Léopold Gourmel; Ragnaud Sabounn; Raymond Ragnaud.

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